Partant du dicton populaire “c’est comme le vélo, ça ne s’oublie pas !”, j’ai voulu voir s’il était possible de le transposer sur les leçons de Maths.
En effet, je me souviens que c’est à l’âge de 6-7 ans que mon père m’avait expliqué comment faire du vélo sans les deux roues latérales. Et malgré de nombreuses années sans pratiquer, je sais encore faire du vélo…
Les mathématiques nous sont familières depuis la maternelle et font partie intégrante de notre vie de tous les jours. On peut se demander pourquoi certaines personnes ont des difficultés à retenir les cours dans cette matière.
En effet, quelle est la relation entre l’apprentissage et la mémorisation ?
Est-elle différente selon le sujet traité ?
Est ce que les notions s’oublient avec les années ou elles se réactivent dès lors qu’on les stimule ?
Allez hop, en selle, on va le découvrir…
Pour illustrer mes explications, je prends l’exemple de Clément qui est en cours de Maths en 5e.
Tout d’abord, j’ai une Bonne nouvelle !…. le processus d’apprentissage du vélo peut s’appliquer aux cours de Maths. Effectivement, chaque individu suit ce même procédé : COMPRENDRE avant d’APPRENDRE pour mieux MÉMORISER !
1 ième étape : COMPRENDRE
En décrivant une nouvelle figure géométrique , la prof de Maths envoie les informations oralement. Malheureusement, Clément n’a pas bien entendu les explications. Différentes causes : le chahut de ses camarades, il bavardait avec son voisin, il comprend mieux quand on lui fait un dessin… On dit que son canal de compréhension/mode de communication est “visuel” et non “auditif”. Quoi qu’il en soit avec les brides de mots qu’il a perçues, il imagine plus ou moins une forme. Il va la mettre en relation avec les autres figures qu’il a déjà vues et acquises auparavant. Clément est du type “intelligence corpo-kinesthésique” selon son profil d’apprentissage, c’est-à dire qu’il doit manipuler ou bouger pour mieux comprendre. Donc, pas étonnant de le voir mimer avec ses doigts des formes possibles. Et en quelques secondes, il retrouve la figure de sa prof.
ÊTRE DANS DE BONNES DISPOSITIONS
Dans la phase de compréhension, l’enfant ne doit pas juste écouter et recevoir les données de manière passive. Il doit être entièrement actif pour aider son cerveau à assimiler l’information.
Sa petite matière grise va alors travailler, transformer puis relier cette nouvelle donnée à ses connaissances/acquis.
L’attention et la concentration sont, également, indispensables. Elles augmentent la rapidité et la fluidité du cheminement de l’information.
CANAL de COMPRÉHENSION / MODE DE COMMUNICATION
Nous sommes dotés de 5 sens mais, en règle générale, seulement 3 sont utiles pour percevoir les signaux de communication. Ils sont appelés « canal de compréhension » ou « mode de communication » :
Chacun d’entre nous a 1 ou 2 canaux de prédilection. Ceci n’est pas une question de goût mais plutôt de formatage du cerveau. De toute manière, il n’y a pas un canal mieux que l’autre.
L’auditif va être plus réceptive aux longs discours, à la musique…
Le visuel va préférer les dessins, les schémas, les tableaux…
Le kinesthésique privilégiera le toucher, la manipulation…
De plus, chaque personne traite l’information selon son ou ses type(s) d’intelligence dominant(s). voir mon article “Allô Docteur, pourquoi mon enfant est “nul” en Maths ?”
Comprendre est le fondement de la mémorisation.
En effet, cela ne sert à rien d’apprendre les cours par cœur si on ne les comprend pas. La mémoire n’enregistrera les informations que pour une période éphémère et l’enfant devrait refaire le travail.
2 ième étape : APPRENDRE
Malgré qu’il ait pris du temps pour retrouver mentalement la nouvelle figure, Clément désire en découvrir d’autres. En effet, il s’est beaucoup amusé à chercher les différentes solutions possibles.
ALLEZ, ON SE MOTIVE !
Chacun apprend à son rythme et selon son envie. C’est cette énergie qui nous motive à commencer, continuer et persévérer dans l’effort.
Il existe deux types de motivation :
– motivation dite “extrinsèque”. C’est lorsqu’un enfant est poussé à étudier par quelque chose ou quelqu’un d’autre. Cela peut être la pression familiale, la peur de la punition, la quête d’une récompense, d’une bonne note…. Il n’a pas la soif d’apprendre par lui-même, il est dépendant de cette force externe pour le booster. C’est le fameux concept “du bâton et de la carotte”.
– motivation dite “intrinsèque”. C’est quand l’enfant agit pour le plaisir même de la tâche, il prend lui-même l’initiative. Ses raisons sont variées. Cela peut être la volonté d’autonomie, de compétence, un besoin d’affiliation, de progrès, de liberté, de curiosité, de développer sa créativité….
Et là, je vous entends me dire “très drôle et comment fait-on pour qu’il s’auto-motive ?”. La meilleure solution est d’écouter et de cerner ses leitmotivs, ses centres d’intérêt.
LE JEU
Le JEU est un excellent véhicule pour transmettre de nouvelles connaissances. Tout en se divertissant, il apprend sans pression, ni peur de l’erreur. Dès son plus jeune âge, il découvre, expérimente et s’amuse en apprenant.
Bien évidemment, les pré-ados/ados vont être davantage attirés vers les jeux vidéos. Je n’ai rien contre les playstations, Xbox, Wii…. mais leur objectif est plus de se défouler que d’apprendre.
Je fais plutôt référence aux jeux appelés “jeux sérieux” ou “jeux pédagogiques”. L’enfant apprend sans le savoir et surtout avec plaisir.
Il essaye et il rate mais cela n’est pas grave. Il sait qu’il n’y a pas d’enjeu extérieur, lui-seul décide de retenter ou d’abandonner. Et vous l’aurez compris, dans la majorité des cas, l’enfant se motive pour se dépasser. Quelque soit son objectif : avoir la bonne réponse, atteindre le niveau supérieur, gagner plus de points….
Et lorsqu’il atteint son but, il en tire une grande satisfaction et une forte estime de soi.
Il est regonflé à bloc et juste…heureux !
Partant de ce génial principe, les concepteurs de jeu se sont mis à la « gamification des cours« . C’est pourquoi, toutes les matières de la primaire au lycée sont déclinées en applications ou sur des sites internet.
LES JEUX DE SOCIÉTÉ
Eh oui, les jeux de société ne sont pas en reste ! Ils sont toujours tendance à voir la liste du père noël ou les parties endiablées entre amis…
Certains permettent d’acquérir des connaissances en se défiant (ex: trivial pursuit, les incollables, qui veut gagner des millions…), développer sa dextérité, son adresse (ex: lego, Jenga, Twister… ), user de son sens du concis et de la communication (ex: taboo, pictionary, time’s up…), être de fins stratèges (ex: monopoly…), utiliser sa logique (ex: mastermind, échecs…).
Il y a aussi la tendance des “Escape game” ou “Escape the room”. C’est une sorte de jeu de rôle en grandeur nature (ex: cluedo). Le but est de parvenir à s’échapper d’une pièce en résolvant des énigmes.
« APPRENDRE » AVEC PRÉCAUTION
Apprendre en s’amusant est le mieux. Néanmoins, il ne faut pas oublier que le simple fait d’apprendre peut s’avérer déstabilisant pour certains enfants.
C’est une remise en cause, une modification ou un renouvellement de leurs acquis.
Parfois si cela est trop compliqué pour eux, ils peuvent baisser les bras. Les plus timides n’oseront même pas demander de l’aide que ce soit à un parent, un prof ou un camarade.
C’est pourquoi, il est primordial de les encourager, de les féliciter pour qu’ils prennent confiance en eux.
De plus, il ne faut pas montrer l’erreur comme une fatalité; mais au contraire, un outil pour mieux se connaître (forces et faiblesses), progresser voire se dépasser.
APPRENDRE EN GROUPE
Faire les devoirs en groupe peut être stimulant tant qu’il y a une compétitivité saine.
Les enfants se challengent entre eux et se charrient si l’un d’entre eux annonce un mauvais résultat. Les autres pourront le guider s’il le souhaite. Et s’il décline, par timidité ou orgueil, il se penchera, lui-même, sur son erreur. Et il fera son maximum pour être à la hauteur la prochaine fois.
Quelque soit la méthode utilisée pour s’éduquer, il ne faut pas “dormir sur ses lauriers” ou ressentir de “l’amotivation”.
Apprendre de nouvelles choses nous procure de grandes satisfactions. C’est une des différences entre nous et les animaux.
Nous avons conscience : de notre savoir, de notre imagination et de notre envie de nous informer.
3 ième étape : MÉMORISER
Clément a compris et appris le cours de Maths.
Mais est ce qu’il va retenir la notion dans la durée : pour toujours ou juste pour le contrôle ?
I AM A MACHINE
Comme les ordinateurs, nous sommes équipés d’une mémoire vive RAM et une mémoire morte ROM. En d’autres termes, nous avons la capacité de stocker des données à utiliser sur des durées variables :
– une courte période “mémoire sensorielle” (de l’ordre de 1-2 secondes et elle est basée sur nos sens),
– une moyenne période “mémoire de travail” (pour les tâches de la vie courante),
– une “mémoire à une longue période” (qui peut durer toute la vie). Cette dernière dépend de la qualité de stockage de l’info. Plus la donnée est structurée et réactivée; et plus, elle sera ancrée dans la mémoire rejoignant ainsi les acquis.
MUSCLER SA MÉMOIRE
Cependant, comme pour les machines, nous pouvons aussi être victimes de bugs.
Qui ne s’est pas dit, un jour, “zut, où est ce que j’ai mis les clés de la voiture ?”, “Ai-je bien éteint la lumière de la cuisine avant de sortir”…
Bref, telles des Dory, nous présentons parfois ses symptômes de défaillance de mémoire. Néanmoins, n’allez pas croire que vous souffrez de la maladie d’Alzheimer, non plus !
Je tiens à vous rassurer. Même si on rencontre ces légers problèmes, ce n’est pas notre capacité à mémoriser qui est fautive mais la méthode utilisée….ouf !
Il faut savoir que la mémoire est un véritable chef d’orchestre. Elle enregistre, conserve et rappelle les expériences passées ou informations acquises.
Elle le fait plus ou moins rapidement, si on a l’a exercée au préalable. En effet, si on ne stimule pas notre cerveau, comme on entraîne un muscle, il se relâche. (comme mes abdos qui sont portés disparus depuis le lycée).
J’AI LA MÉMOIRE QUI FLANCHE…
Hermann Ebbinghaus, philosophe allemand du 19e siècle, a élaboré une “courbe de l’oubli”.
Il émet l’hypothèse que l’on oublie plus vite quelque chose quand on n’a ni le sens, ni une représentation. Et c’est d’autant plus vrai quand nous ne sommes pas dans de bonnes conditions comme le stress ou la fatigue.
Afin de palier à ce déclin et d’inscrire l’information dans nos méninges plus favorablement et durablement, il suggère une méthode en 2 phases.
En premier lieu, il faut une astuce pour retenir cette nouvelle notion. On s’aide des techniques mnémoniques . Selon son type d’intelligence, on va privilégier : des chansons, des images, des schémas, des visualisation d’objets dans une pièce, des phrases/mots/lettres, des histoires, des “carte mentales” etc…
Et dans un second lieu, il faut inscrire cette nouvelle notion dans le temps. On va alors effectuer des “RAPPELS”, c’est-à-dire une répétition espacée dans le temps.
A la lecture du graphe, on remarque qu’avec ces fameuses piqûres de rappel, on arrive à retenir jusqu’à 90% au bout d’un mois. A contrario, si on ne stimule pas notre mémoire, elle atteint le niveau de celle de Dory : 20%.
Le but de ces exercices est de se focaliser sur l’essentiel du cours, pour pouvoir le graver rapidement dans notre esprit et le ressortir quand on en a l’utilité.
4 ième étape : CONNAITRE
Une semaine plus tard, alors qu’il est en cours de géographie, Clément entend le prof demander le nom du bâtiment américain abritant le ministère de la défense. Personne ne lève la main pour répondre. L’enseignant donne un indice “celui qui est à Washington, non loin de la Maison Blanche”. Toujours aucune réponse. Alors, il montre, à la classe, une photo du bâtiment. Soudain, Clément lève le doigt et dit “le Pentagone !”. L’enseignant acquiesce et tous ses camarades le félicite. Clément ne connaissait pas le bâtiment auparavant mais dès qu’il a vu la forme, il s’est souvenu de son cours de maths.
Lorsque l’apprentissage se fait dans de bonnes dispositions et selon la méthode la plus adaptée à chacun, les données sont ancrées dans la mémoire et peuvent être réactivées à tout moment consciemment ou non.
Le cerveau a cette fabuleuse capacité de stocker les informations comme une bibliothèque et de les faire ressortir comme un moteur de recherche internet.
Donc les cours de maths ne s’oublient pas si elles sont bien comprises/apprises et peuvent même être utiles pour d’autres sujets.